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14 février 2018

Constat des députés au C.R.A.

Le constat amer de trois députés dans un centre de rétention. Le Monde édition du 14/02/2018

Maryline Baumard

Al’entrée de la zone réservée à l’enfermement des familles, le commissaire Pierre Bordereau, directeur des centres de rétention d’Ile-de-France semble heureux de montrer aux trois députés le « dispositif anti-pincement de doigts » installé sur les portes. Le détail aurait pu faire son effet. Mais au centre de rétention administrative (CRA) numéro deux du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne), lundi, il a fait un bide. Les regards des députés se sont plutôt arrêtés sur « l’absence de serrures aux toilettes », ou « l’état de certaines chambres aux murs maculés ». Ce qui a vite amené Yaël Braun-Pivet (La République en marche, LRM, Yvelines), présidente de la commission des lois, à affirmer que « si on veut augmenter la durée de rétention, il va falloir adapter sérieusement les locaux ».

Avant de discuter la loi asile et migration, bientôt en débat, qui prône plus de cent jours de rétention pour préparer l’expulsion d’un étranger, contre quarante-cinq aujourd’hui, Mme Braun-Pivet, Naïma Moutchou (LRM, Val-d’Oise) et Stéphane Peu (PCF, Seine-Saint-Denis) sont venus constater qui on enferme en CRA et dans quelles conditions.

La réponse leur est notamment apparue sous les traits d’un bébé de 13 mois, entamant sa deuxième semaine de privation de liberté, accroché au dos de sa mère. Cette dernière, une Ivoirienne de 20 ans, avait pourtant deux raisons de ne pas se trouver là. Ayant laissé ses empreintes pour la première fois en Europe en Italie, elle pouvait y être renvoyée au nom des accords de Dublin. Et la Cour de cassation a estimé, le 27 septembre 2017, que rien dans le droit français ne permettait de placer un « dubliné » en rétention. A cette entorse à la loi s’ajoute le fait que la France a déjà été condamnée six fois par la Cour européenne des droits de l’homme pour la privation de liberté d’un mineur.

Au Mesnil-Amelot, les députés ont aussi découvert un nouveau profil de « retenu », des personnes venant de la zone de transit de Roissy. Comme une Hondurienne, en route vers l’Espagne, placée au CRA après dix jours passés en zone d’attente à Roissy pour avoir refusé de monter dans un vol retour. Non loin, une Tunisienne, munie d’un visa pour étudier en Ukraine, se retrouve aussi là pour avoir refusé un retour. « Il n’est pas question que je retourne en Tunisie puisque je vais en Ukraine », rétorque-t-elle. Les trois députés, eux, sont repartis vers l’Assemblée nationale. Peut-être un peu mieux armés pour écrire le futur droit des étrangers.

 

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